C’est l’œuvre d’un grand médiéviste que fatiguent les légendes. Il met en cause les ouvrages plus ou moins romancés qui ont fait de Gilles de Rais le « grand chef de guerre-compagnon de Jeanne d’Arc » devenu satanique, massacreur de centaines de jeunes garçons qu’il a sodomisé, inspirateur de Barbe-bleue, ou, à contrario, la victime à la fois de l’Inquisition, de sa famille et des appétits du Duc de Bretagne, confessant sous la torture des crimes qu’il n’avait pas commis. Se fondant sur les seuls documents connus, les confrontant à ce que l’on sait de la France féodale au temps de la guerre de Cents ans, Jacques Heers fait de Gilles de Rais et de son époque le tableau le plus fidèle possible à la réalité. Sur son dévouement à Jeanne d’Arc, sur son illustration et son importance en tant que chef de guerre et Baron de Bretagne, sur ses dépenses somptuaires, sur les accusations, sur le déroulement et la nature des procès qui l’ont envoyé à la mort, il apporte un regard critique, novateur. C’est un Gilles de Rais débarrassé des interprétations romanesques, anachroniques ou hasardeuses. Certains diront que c’est une version de plus de l’histoire de cet homme à la personnalité ambigüe, c’est le moins que l’on puisse dire. D’autres ouvrages, nombreux, permettent de cerner le personnage sous des angles différents.